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Responsabilité de l’agent immobilier

Publié le 15/11/2023

La responsabilité de l’agent immobilier est souvent recherchée par les vendeurs et/ou acquéreurs. Mais est-il responsable de tout ?

Les fondements de la responsabilité

Il existe deux types de responsabilités : la responsabilité contractuelle (art.1231-1 du Code civil) et la responsabilité délictuelle (art. 1240 du Code civil). Le signataire d’un mandat agira, le plus souvent, sur le fondement de la responsabilité contractuelle et les tiers au contrat sur la responsabilité quasi-délictuelle.

Trois conditions doivent être réunies pour qu’une demande d’indemnisation aboutisse :

  • une faute,
  • un préjudice
  • et un lien de causalité entre eux.

Si l’une de ces trois conditions fait défaut, la responsabilité ne peut être engagée. La seule existence d’une faute est insuffisante car elle « n’implique pas nécessairement l’existence d’un dommage en relation de cause à effet avec cette faute » (Cass. 2e civ. 11 septembre 2008, n°07-20857).

De même, « des dommages et intérêts ne peuvent être alloués que si le juge, au moment où il statue, constate qu’il est résulté un préjudice de la faute contractuelle » (Cass. 3ème civ. 3 décembre 2003, n°02-18033).

Les types d’obligations

L’agent immobilier est débiteur de deux types d’obligations :

  • une obligation de moyens pour l’intermédiation
  • et une obligation de résultat au titre de la rédaction du compromis.

Pour la recherche d’un acquéreur, l’agent immobilier ne garantit pas qu’il va trouver un acquéreur mais il s’engage à faire ses meilleurs efforts pour le trouver. C’est une obligation de moyen.

Cependant, quand il rédige le compromis, l’agent immobilier – comme tout rédacteur d’acte – est débiteur d’une obligation de résultat. À ce titre, il doit garantir l’efficacité des actes qu’il rédige (Cass. 3e civ, 28 novembre 2007, n°06-17758).

Enfin, l’agent immobilier est responsable des fautes commises par ses salariés (art.1242 du Code civil). La situation est différente si le collaborateur est indépendant ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle ce dernier doit être assuré par une assurance en responsabilité civile.

Quand la responsabilité d’un agent immobilier est mise en cause, il lui est le plus souvent reproché un manquement à son obligation de conseil. Cette obligation de conseil recouvre une réalité extrêmement large et peut s’analyser en une obligation de vigilance, d’information et de conseil .

L’obligation de vigilance

L’obligation de vigilance résulte de dispositions légales ou de la jurisprudence.

  • Tracfin : le professionnel de l’immobilier a une obligation légale de vigilance dans le cadre de la réglementation du Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (dite TRACFIN). Il en résulte diverses obligations pour les professionnels qui y sont assujettis dont une obligation de vigilance (art. L561-4-1 du Code monétaire et financier).
  • Droit de rétractation : SRU : à propos de la purge par voie postale du droit de rétractation de l’acquéreur non professionnel d’un bien à usage d’habitation, la Cour de cassation juge depuis 2019 qu’il appartient au professionnel « de vérifier la sincérité, au moins apparente, de la signature figurant sur l’avis de réception de la lettre recommandée adressée aux acquéreurs » (Cass. 3e civ. 21 mars 2019, n°18-10772). À défaut, elle retient la responsabilité de l’agent immobilier qui avait purgé le droit de rétractation.
  • Diagnostics : la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence a retenu quant à elle la responsabilité d’un agent immobilier pour ne pas avoir vérifié un diagnostic Carrez. Le diagnostiqueur avait intégré à tort la cave dans le calcul de la Carrez. Or selon la Cour, par une « simple lecture » l’agent immobilier, « aurait dû vérifier l‘exactitude des informations qui lui étaient transmises » et s’apercevoir de l’erreur. (CA, Aix-en-Provence, 3 septembre 2019, RG 17/07459).

L’obligation d’information

L’obligation d’information est inscrite dans le Code de déontologie et l’agent immobilier doit informer les vendeurs et les acquéreurs de « l’ensemble des informations qui leur sont utiles pour qu’ils prennent leur décision de façon libre et éclairée » (art. 8-3 du Code de déontologie).

Ainsi, la responsabilité d’un agent immobilier a été retenue pour :

  • n’avoir pas informé des acquéreurs avant la signature du compromis de précédents travaux contre la mérule, dont la mention figurait sur le titre de propriété (Cass. 1ère civ. 14 novembre 2019, n°18-21971).
  • avoir insuffisamment informé des acquéreurs d’un sinistre résolu relatif à des fissures, en se bornant à indiquer que le dossier avait été clôturé sans solliciter du vendeur plus d’informations et de justificatifs et sans effectuer plus de recherches (Cass. 3e civ, 14 décembre 2017, n°16-24170).

L’obligation de conseil

L’obligation de conseil peut revêtir de nombreuses formes et les tribunaux peuvent être sévères à l’égard des professionnels de l’immobilier.

Ainsi, la cour suprême a retenu qu’« il incombait à l’agent immobilier d’informer ses mandants de la nécessité de porter à la connaissance des acquéreurs l’état d’avancement du projet de rocade ». C’est en vain que l’agent immobilier a soutenu que les vendeurs « n’avaient aucunement besoin du conseil de l’agent immobilier pour se rendre compte que leur silence délibéré trompait leurs cocontractants » (Cass. 1ère Civ, 9 janvier 2019, n°18-10245).

La responsabilité de l’agent immobilier peut également être retenue à propos de la solvabilité d’un acquéreur. Dans une affaire où les vendeurs étaient informés des faibles revenus de l’acquéreur, de l’absence de séquestre et de la renonciation à la condition suspensive de financement, la responsabilité du professionnel a été retenue car il ne justifiait pas avoir conseillé aux vendeurs de prendre des garanties, ni les avoir mis en garde contre le risque d’insolvabilité de l’acquéreur (Cass. 3e Civ. 11 décembre 2019, n°18-24381). On note ici la différence entre l’obligation d’information qui a été réalisée et l’obligation de conseil qui ne l’a pas été.

Enfin, si l’agent immobilier est tenu d’une obligation de conseil sur le visible et le su, il ne l’est pas sur l’invisible et le non su.

Vices cachés

Dans la vente d’immeubles anciens entre particuliers, il est d’usage que les actes prévoient une clause exonératoire de responsabilité pour vices cachés entre vendeur et acquéreur. Une telle clause n’est cependant pas applicable quand le vendeur est un professionnel de l’immobilier ou qu’il connaissait le vice caché.

En dépit de cette clause, le contentieux en la matière est abondant, l’acquéreur soutenant que le vendeur avait connaissance du vice caché et ne l’en a pas informé. Mais indépendamment des rapports vendeur/acquéreur, la responsabilité de l’agence peut-elle être recherchée ? Si oui, dans quelles conditions ? Comment ça se passe dans la pratique ? Et d’ailleurs, qu’est-ce qu’un vice caché ?

Définition du vice caché

Le Code civil définit les vices cachés comme « des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus » (article 1641).

Plusieurs conditions doivent donc être réunies :

  • rendre le bien (l’immeuble) impropre à sa destination ;
  • ne pas être connu de l’acquéreur lors de l’achat ;
  • avoir une origine antérieure à la vente ;
  • être inhérent au bien vendu.

Dès lors, un vice caché peut porter sur l’immeuble, le sol ou même être juridique (liste non limitative) :

  • malfaçons électriques (Cass. 3e civ., 20/1/1999, n° 97-10756) ;
  • accès très difficile à un garage (Cass. 3e civ., 7/12/2005, n° 04-18107) ;
  • humidité (Cass. 3e civ., 2/3/2001, n° 99-13017) ;
  • défaut d’étanchéité de la toiture (Cass. 3e civ. 12/9/2006, n° 05-17228) ;
  • présence de mérules (Cass. 3e civ. 10/11/1999, n° 98- 10909) ;
  • ampleur de la pollution du sol (Cass. 3e civ. 8/6/2006, n° 04-19069) ;
  • inconstructibilité d’un terrain découverte suite au refus du permis de construire de l’acquéreur (Cass. 3e civ. 12/3/2002, n° 97-19966) ;
  • retrait d’une autorisation de voirie qui faisait obstacle à l’exploitation d’un immeuble acquis à des fins commerciales (Cass. 3e civ. 21/11/2001, n° 00-14826).

L’action sur les vices cachés doit être engagée dans les deux ans à compter de la découverte du vice (article 1648 du Code civil). En raison de ce bref délai et notamment s’il est dépassé, l’acquéreur pourrait être tenté de fonder son action non plus sur les vices cachés mais sur le défaut de délivrance du bien. Cette notion est proche cependant différente : le vice caché est un défaut grave rendant le bien impropre à sa destination, le défaut de délivrance est une non-conformité du bien fourni par rapport au bien convenu. La frontière entre les deux notions est très délicate à faire.

Quelles responsabilités pour l’agence ?

On pourrait résumer la jurisprudence sur la responsabilité de l’agent immobilier comme suit : l’agence a un devoir de conseil sur le visible et le su mais pas sur l’invisible et le non-su.

Concernant les vices apparents, la jurisprudence rappelle que l’agence a l’obligation «d’examiner soigneusement le bien objet de la vente, afin d’en déterminer les éléments  essentiels, dont les conditions de construction, les qualités mais aussi, le cas échéant, les défauts majeurs perceptibles par un simple examen des apparences sans avoir à opérer de démontages ou d’investigations approfondies, ce qui devait lui permettre de remplir son obligation de conseil et d’information tant à l’égard des vendeurs ses mandants, sur un fondement contractuel, que des acquéreurs, sur un fondement  délictuel » (CA Versailles 3e ch., RG n° 04/05469).

En application de ce principe, la Cour suprême confirme l’arrêt « qui a retenu, à bon droit, que l’agent immobilier devait attirer l’attention des acquéreurs sur l’origine très vraisemblable des fissures apparentes et sur leur gravité potentielle pouvant affecter la structure de l’immeuble» (Cass. 3e civ. 07-21910 – 07-21953, 8/4/2009).

Par contre, si l’agent signale à l’acquéreur l’existence de désordres affectant l’immeuble et lui conseille de prendre l’avis d’un spécialiste, sa responsabilité ne peut plus être engagée : il a rempli son obligation de conseil.

Dans une affaire où le professionnel avait informé les acquéreurs de la présence de capricornes et leur avait conseillé de prendre l’avis d’un spécialiste, la Cour ne retient pas sa responsabilité quant à la présence également de termites, au motif qu’informés de la présence d’insectes xylophages, « il appartenait aux acquéreurs de faire preuve d’une prudence élémentaire et de suivre le conseil de l’agent immobilier » (Cass.3e civ., 26/2/2003, n° 01-12750).

Concernant les vices cachés, il est constant que l’agent immobilier ne peut donner un conseil sur un vice caché puisque, par définition, il est caché : il n’est pas tenu d’une obligation de conseil sur l’invisible !

En outre, l’agent immobilier n’est pas un professionnel du bâtiment (Cass. 3e civ., 26/10/2017, n° 16-21951 ; Cass. 3e civ., 21/1/2015, n° 13-17982 ; Cass. 3e civ., 8/4/2014, n° 09-72747).

La Cour de cassation le rappelle régulièrement : l’agent immobilier « n’étant pas un professionnel de la construction, les acquéreurs ne peuvent soutenir que le vice était caché pour eux mais apparent pour l’agent immobilier ; que les époux Z… n’apportent pas la preuve qui leur incombe que la société X… avait connaissance du vice non apparent, affectant l’immeuble au moment de la vente » (Cass. 3e civ., 8/4/2014, n° 09-72747).

Le professionnel de l’immobilier n’a pas à effectuer des recherches destructives, ni à faire de diligences supplémentaires si l’état apparent de l’immeuble et les informations reçues ne le justifient pas (Cf. jurisprudence précitée).

Le conseil pratique

Faire signer les bons de visites par tous les visiteurs et à chaque visite.

En effet, il est fréquent qu’avant la signature de l’acte authentique, les acquéreurs effectuent une visite du bien avec un architecte et/ou des entrepreneurs pour l’établissement de devis. Le bon de visite permet, certes de contribuer à la protection de votre droit à honoraires, mais il peut également prouver que les acquéreurs ont été conseillés par des professionnels du bâtiment avant la vente.

Le contentieux, comment ça se passe :

Plusieurs intervenants, voire tous, peuvent être mis en cause : vendeur, diagnostiqueur, notaire, agence immobilière. La procédure se déroule, généralement, en trois phases :

  1. Le référé : les acquéreurs assignent ceux qui potentiellement peuvent avoir une responsabilité et demandent la désignation d’un expert. À ce stade, soit avant les opérations d’expertise, il est difficile d’obtenir une mise hors de cause de l’agent immobilier même si les acquéreurs reconnaissent eux-mêmes que le vice était caché.
  2. L’opération d’expertise : l’expert se rend sur place pour répondre à la mission qui a été fixée par le tribunal. Les parties et leurs avocats assistent aux opérations d’expertise et font part de leurs observations à l’expert au moyen de « dires ».
  3. Le partage des responsabilités : il sera tranché par le juge après le dépôt du rapport de l’expert.

 

 

 

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